TECHNOBOSS

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« Il voyage en solitaire et nul ne l’oblige à se taire », chante Gérard Manset. Cette chanson caractérise assez bien ce qui se passe dans Technoboss du réalisateur portugais João Nicolau. Luis, son personnage principal effectue de fréquents trajets en automobile et ses déplacements sont autant d’occasions pour lui de pousser la chansonnette.

Technoboss est un drôle de film. Certains ont même parlé d’un OVNI cinématographique. Il met en scène un technicien en système de sécurité et de surveillance qui voit, sans enthousiasme, l’heure de la retraite approcher. En attendant, ce grand-père excentrique et bon vivant se défoule en chantant derrière son volant et surtout ne renonce pas à reconquérir Lucinda, une ancienne maîtresse.

Le metteur en scène João Nicolau qui signe son troisième long métrage a voulu traiter ici l’inévitabilité du vieillissement avec une esthétique dépourvue de pitié ou de compassion. Devant l’énergie et la folie douce qui se dégagent des aventures musicales ou non de son protagoniste, il est clair qu’il a respecté son engagement.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver DEUX DRÔLES D'OISEAUX (Pour l'un de ses héros, un retraité joyeux drille) ou encore LES BIEN-AIMÉS (Une comédie chantée où l'on retrouve le thème de la jeunesse qui passe).

La musique est un élément essentiel du cinéma de João Nicolau. Le cinéaste a toujours fait figurer des musiciens qui jouent en direct dans ses films. Dans Technoboss, il expérimente quelque chose de différent et privilégie le côté personnel et intime de la musique plus que la performance en soi. Son personnage principal chante donc comme nous le faisons tous au quotidien. Technoboss n’est pas précisément une comédie musicale et les chansons sont là pour faire progresser le récit et nous renseigner sur la personnalité de l’extravagant Luis. Le réalisateur a travaillé avec deux compositeurs aux styles musicaux différents. La collaboration a été totale et certaines scènes ont même été suggérées par les compositeurs.

Dans son précédent film, John from, João Nicolau faisait danser deux ados sur la « Lambada ». Cette fois c’est au son du tube planétaire de Las Ketchup « Asereje », que son personnage sexagénaire se lâche après une soirée bien arrosée. Au-delà de cette prestation dansée, la composition de Miguel Lobo Antunes mérite qu’on s’y arrête. D’autant que le comédien fait ici ses débuts devant la caméra à 70 ans. C’est lors d’une soirée à laquelle participait ce père d’un de ses collègues que le réalisateur s’est dit qu’il tenait l’interprète de Luis. Mais ce juriste et administrateur de centres culturels à la retraite n’a pas été facile à convaincre. Il a confié par la suite que son expérience cinématographique l’avait bien aidé à dépasser une certaine tristesse qui le gagnait depuis sa retraite récente.

Avant le tournage, le cinéaste avait établi une sorte de cahier des charges informel avec ses différentes intentions. L’une d’elle était : « Faire un film dans lequel le protagoniste est tout le temps dans une voiture, mais qui n’est pas un road movie ; un film réalisé par un type qui déteste les voitures, qui n’y connaît rien en voitures, et qui jusqu’à présent n’a filmé que des voitures immobiles ou des voitures qui se déplacent seules sans chauffeur. » Un sacré défi donc pour lui. Après coup, Nicolau confirme que tourner dans une voiture a été un vrai cauchemar technique….