NOTRE JOUR VIENDRA

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« On ne peut pas être le fils de Costa-Gavras impunément », affirmait Vincent Cassel à l’occasion de la sortie de Notre jour viendra, en septembre 2010. En effet, le réalisateur Romain Gavras est né en 1981, alors que son illustre papa venait de tourner Clair de femme, avec Romy Schneider et Yves Montand, et qu’il préparait Missing, avec Jack Lemmon et Sissy Spacek, futur Oscar de la meilleure adaptation.

Comme Obelix, qui est tombé dedans quand il était petit, c’est assez naturellement que le jeune homme s’orienta vers la mise en scène, créant, très tôt, vers 13-14 ans, en collaboration avec son sulfureux camarade Kim Chapiron – lui-même fils du graphiste Kiki Picasso (sans rapport avec le peintre !) – et, avec le soutien de Vincent Cassel – déjà –, une structure, à la fois « collectif d'artistes » et « société de production », baptisée Kourtrajmé. Et des kourtrajmés, enfin je veux dire des courts métrages, ils vont en tourner plusieurs, dont La Barbichette, en 2002, réalisé par Kim Chapiron, éclairé par Romain Gavras et interprété par Vincent Cassel et Olivier Barthélémy.

C’est en réalisant des clips que Romain Gavras se fera particulièrement remarquer, provoquant même la polémique avec des images extrêmement violentes – voire gore – pour le morceau intitulé Stress, du groupe électro Justice, et pour Born Free, de la chanteuse anglaise de hip-hop M.I.A., dans lequel – déjà ! – un groupe de roux était confronté aux violences, à priori gratuites, d’une armée de brutes anti-roux. C’est dans ce même clip que l’on pouvait voir une fresque intitulée « Our day will come », autrement dit : « Notre jour viendra » ! La rousseur ou, plus exactement, le roux est donc un thème récurrent, voire une obsession, dans l’œuvre du jeune cinéaste puisque Notre jour viendra, son premier long métrage, met en scène deux personnages d'asociaux, Rémy (Olivier Barthélémy), jeune homme renfermé et toujours humilié, et Patrick (Vincent Cassel), psy nihiliste et provocateur, qui, à la recherche de sensations fortes, vont imaginer appartenir à la communauté des roux, et justifier, ainsi, leur révolte, en même temps que cette « quête hallucinée vers l’Irlande et la liberté », comme Romain Gavras qualifie, lui-même, son film en forme de road movie, pour le moins, déroutant.

Notre jour viendra marque la quatrième rencontre d’Olivier Barthélémy et Vincent Cassel, qui venait de remporter le César du meilleur acteur pour son incarnation de Jacques Mesrine dans l’Instinct de mort et l’Ennemi public n°1, le fameux diptyque de Jean-François Richet. Dans le rôle du réceptionniste, vous reconnaîtrez peut-être Pierre Boulanger, Momo, le jeune partenaire d’Omar Sharif dans Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran et revu, depuis, dans Nos 18 ans, de Frédéric Berthe. 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LES VALSEUSES (1974) ou encore DONNE-MOI LA MAIN (2009) .

Aussi étrange que cela puisse paraître, Romain Gavras affirme avoir été très influencé, pendant l’écriture de ce premier long métrage, par les comédies italiennes des années 60/70. En fait, ce qui l’intéressait dans ces films, devenus des classiques, ce sont, comme il le dit lui-même, les « émotions contradictoires » qui donnent naissance à des récits non linéaires. C’est ce qu’il voulait obtenir avec Notre jour viendra. Surtout, ne pas faire un film dramatique, où tout serait dramatique, un film romantique, où tout serait romantique, une comédie où tout serait... Vous m’avez compris.

Comme il l’a expliqué, lui-même, Gavras voulait faire « un film moderne qui capture le brouillard mental de l’époque » et, surtout, ne pas expliquer le pourquoi du comment. « Le cinéma actuel veut tout rendre lisible, dit-il, alors que nous sommes dans une époque où tout est un peu flou. Je voulais qu’on le ressente. Que l’on ne soit pas dans des codes manichéens et des schémas démonstratifs trop simples. » Voilà pourquoi, si l’idée maîtresse était de faire un film libre autour d’un parcours initiatique développant l’idée que ce dont on hérite à la naissance, certains ne s’en relèvent pas, Romain Gavras et son coscénariste Karim Boukercha ont supprimé tout ce qui était trop explicatif, estimant que trop de films, aujourd’hui, se donnent sans mystère, à cause d’un modèle narratif où chaque acte et chaque sentiment possèdent son explication. Les deux jeunes gens voulaient faire un film de sensations, d’ambiances et d’émotions, où le spectateur cheminerait avec les personnages. L’un et l’autre préfèrent « l’instinct » à « l’auto-analyse » qui pousse à trop intellectualiser.

Pas très bavard sur son travail pour cette raison, Romain Gavras a accepté, cependant, d’évoquer trois points importants concernant son film. D’abord, le décor. « A mes yeux, dit-il, le nord de la France possède la puissance des grandes steppes irlandaises. Les paysages y ont quelque chose de très dramatique et les gens en sont empreints. » D’ailleurs, les trois quarts des acteurs sont des non professionnels habitant le Pas-de-Calais.

Autre sujet important, les roux. L’idée est venue pendant l’écriture du scénario. Pour Romain Gavras, cette particularité rendait les deux héros plus « iconiques et donc universels » mais, attention, veillant toujours à ne point trop en dire, il ne fallait pas en parler « frontalement », ne surtout pas en faire des « poil de carotte ». D’ailleurs, ni Vincent Cassel ni Olivier Barthélémy ne sont vraiment roux, ce qui, pour les deux auteurs du scénario, devait « accentuer leur fantasme sur une communauté qui n’existe que dans leur esprit, un peuple qui n’aurait ni pays, ni langue, ni armée. »

Un mot, enfin, sur Vincent Cassel, sans qui le film ne se serait jamais fait : « Je trouve vraiment courageux qu’un acteur de son niveau prenne du temps pour faire ce type de projet, avouait – reconnaissant – Romain Gavras, pendant le tournage. Ce film ne peut lui rapporter que des ʺemmerdesʺ et très peu de gloire, car on ne fera pas des millions d’entrées. » On ne peut pas mieux dire, sorti dans 43 salles, le 15 septembre 2010, le film ne parvint à intéresser, la première semaine, que 20.368 spectateurs dont, peut-être, un certain nombre de... roux !

Ami du réalisateur depuis l’école primaire, le cadreur et directeur de la photographie, André Chemetoff, étant légèrement plus petit que les deux acteurs principaux qu’il devait souvent filmer caméra sur l’épaule, dut se rendre dans une boutique spécialisée pour se faire mettre des semelles de 10 cm, afin d’être à la hauteur. Ce petit accessoire lui valut de se faire traiter de drag-queen pendant toute la durée du tournage !

Comment expliquer "Notre jour viendra"? En gros c'est l'histoire de deux roux (Cassel et Olivier Barthélémy) qui se rencontrent pas hasard et qui partent dans une spirale de haine absurde et nihiliste pseudo-post-punk sur fond de vrai-faux Road Movie totalement vide de sens ...

A l'avant-première du film à l'ugc des Halles, Romain Gavras qualifie son film, non sans un certain sourire, de "comédie romantique moderne". Plus connu pour avoir réalisé le clip polémique de Justice et membre de Kourtrajmé, Romain Gavras a en tout cas réussi son passage ...

Film très difficile à sonder, avec un Vincent Cassel (génial) dans un rôle de psychologue tordu qui semble habité d'une colère sourde, paraissant totalement en rupture avec le monde, sans idéaux et buts clairs qui va guider Olivier Barthelemy (génial) pour l'aider à se ...