NE CROYEZ SURTOUT PAS QUE JE HURLE

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Face à la violence quotidienne du monde qui nous entoure (qu’elle soit psychologique, politique ou physique), nous avons tous des réactions différentes. Il y a ceux qui vont s’enfoncer dans la dépression et se recroqueviller. Il y a ceux qui vont se révolter jusqu’à passer à l’action. Il y a ceux aussi qui vont tenter de transformer ces ondes négatives pour faire avancer les choses par la réflexion…

C’est la voie choisie par Frank Beauvais dans « Ne croyez surtout pas que je hurle ». Son film est difficilement classable mais disons qu’il s’agit d’un pamphlet documentaire et fictionnel né des attentats de novembre 2015.

Se retrouvant seul dans un petit village d’Alsace après l’épilogue malheureux d’une histoire d’amour, le réalisateur se pose devant son écran regarde près de 400 films et décide d’y piocher des séquences qui vont illustrer son état d’esprit. Le résultat que voici est fascinant : à la fois cri d’alarme et de révolte…

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LE SEL DE LA TERRE (Et si regarder le monde et faire un voyage en nous-mêmes était en fait le même chemin vers l'apaisement ?) ou encore LE LIVRE D'IMAGE (Beauvais comme Godard utilisent les images des autres pour nous raconter leur histoire et donc un peu la nôtre...).

Après avoir regardé « Ne croyez surtout pas que je hurle », vous vous êtes peut-être écrié « purée, quel film ! ». Vous ne croyez pas si bien dire puisque pour mener à bien son projet, le réalisateur Frank Beauvais a utilisé le principe du « mashup » qui se traduit par « purée ». Il consiste à assemble à la manière d’un sample musical des images ou des séquences pour donner corps à un nouveau récit qui, à l’arrivée, n’a rien à voir avec les versions originales… Le web est l’écrin naturel et auto-proclamé du « mashup », donnant même lieu chaque année à un festival qui lui est dédié mais le cinéma sur grand écran s’en est aussi inspiré. Nombre de films intègrent par exemple des extraits d’autres films dans leur trame, pour souligner une action ou exprimer une idée.

Ainsi en 1962 dans « Vivre sa vie », Jean-Luc Godard a-t-il intégré des plans entiers de « La passion de Jeanne d’Arc » de Dreyer. Nouvelle Vague toujours cette même année et autocitation de François Truffaut qui dans « Antoine et Colette » montre des scènes de ses « 400 coups » sorti trois an plus tôt ! Federico Fellini ne fera pas autre chose en 1987 dans « Intervista », citant à l’écran sa « Dolce vita » de 1960… Emir Kusturica lui a voulu détourner des moments précis comme la poursuite de l’avion dans « La mort aux trousses », de « Raging bull » de Scorsese ou du « Parrain » de Coppola dans « Arizona dream » en 1993. On se souvient également de Vincent Cassel dans « La haine », mimant Robert de Niro devant son miroir dans « Taxi driver » …

Autre style de « mashup » : celui choisi par certains cinéastes pour faire entrer leurs héros dans un film qui n’est pas le leur mais qui le devient… Je m’explique par l’exemple : dans « Ready player one » en 2018, non content de truffer son scénario de multiples références à la pop culture, Steven Spielberg consacrait une séquence entière à « The shining » de Stanley Kubrick, recréant à l’identique le décor de l’Overlook Hotel pour y plonger ses personnages…

Ne croyez surtout pas que je hurle, le premier long métrage de Frank Beauvais, assisté au montage par Thomas Marchand, se constitue d'un enchaînement de plans de films de fictions – particulièrement appréciés par le réalisateur – et qui, telle une cartographie, révèlent ...

Lorgnant plus vers le cinéma expérimental que le documentaire, Frank Beauvais renouvelle l'autobiographie sur grand écran. Il raconte en voix-off les derniers mois qu’il a passé entre mars et octobre 2016 reclus en solitaire dans une maison en Alsace avant de revenir s’installer ...

NE CROYEZ SURTOUT PAS QUE JE HURLE (16,9) (Frank Beauvais, FRA, 2019, 75min) : Ne croyez surtout pas que je hurle, premier long métrage de Frank Beauvais, livre une introspection intime au milieu d’un kaléidoscope d’images cinématographiques, pour éclairer son âme embrumée ...