LOLA VERS LA MER

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« Parfois, on peut devenir le parent de ses propres parents. » Tel est sans doute le coeur de Lola vers la mer, selon Laurent Micheli qui l’a écrit et réalisé. Son film illustre cette idée à travers la relation complexe et tendue qu’entretient un père à côté de la plaque avec Lola, sa fille, âgée de dix-huit ans.

Transgenre, l’adolescente n’a pas toujours porté un prénom féminin et son père rejette résolument cette identité. Pourtant tous deux vont être amenés à faire un voyage ensemble. Et, comme dans tout road movie qui se respecte, le chemin à parcourir sera tout autant physique qu’émotionnel.

Face à Benoît Magimel, dans le rôle du père, Mya Bollaers une jeune femme, qui a l’âge du personnage de Lola, fait ses débuts devant la caméra. La comédienne novice tient à préciser que ce n’est pas parce qu’elle est transgenre elle-même qu’elle est le personnnage. « J’ai des points communs avec Lola mais pas plus que n’importe qui d’autre en fait » dit-elle. Pour se préparer à incarner Lola, elle a donc travaillé avec deux coachs mais elle a aussi pris des leçons de skate.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver GIRL (Une adolescente transgenre s'apprête à se faire opérer) ou encore JE SUIS MORT, MAIS J'AI DES AMIS (Quatre rockers partent en tournée avec l'urne funéraire d'un membre de leur groupe).

Laurent Micheli tenait absolument à ce que Lola soit interprétée par une jeune fille trans. Ce choix est pour lui politique. Il est loin de considérer qu’un acteur ne peut jouer que ce qu’il est. C’est même le propre du comédien de jouer ce qu’il n’est pas. Mais le réalisateur estime que nous vivons « une époque charnière, importante, où il faut veiller à ce que les minorités se réapproprient leurs vécus, leurs histoires ». Pour lui cela relève de sa responsabilité de cinéaste de montrer ces personnes à l’écran. « Ce sont des personnes souvent invisibilisées dans la société, constate-t-il, et j’ai envie de les filmer »

Il avait même envie de les filmer au plus près. D’où sa décision d’utiliser le format d’image 4/3 aujourd’hui délaissé au profit du 16/9 triomphant, qualifié de « format large » . Le 4/3 se prête mieux à la captation des émotions. Le décor se fait oublier et le spectateur peut mieux se concentrer sur les visages, les corps. D’une part, le metteur en scène voulait ainsi signifier au public en quelque sorte : « Maintenant tu vas regarder celles et ceux qu’on ne voit pas » ! D’autre part, ce format isole ici les personnages dans le cadre, plutôt que de les réunir. Lola et son père sont assez rarement ensemble dans même cadre. Un parti-pris de mise en scène qui permet de donner à voir leur relation.

Laurent Micheli avait envie de filmer la Belgique à rebours de ce qui se fait généralement. Au lieu d’un pays dans la grisaille il a voulu la filmer « comme la Californie ». Il était nécessaire de donner de la couleur, de la lumière pour contrebalancer la dureté de l’histoire. Le metteur en scène mêle également des villes réelles comme Bruxelles avec des lieux imaginaires comme Stadenburg. En fait, il suffit d’une heure et demie pour aller de Bruxelles à la mer et il fallait s’arranger pour étirer le temps afin de faire évoluer les personnages. L’idée c’est aussi de donner une autre dimension au périple par un décrochage du réel. Lola et son père circulent en quelque sorte dans leur passé, leurs souvenirs. Le voyage devient mental.

J'aurai donc vu deux films belges au cinéma. C'est deux de plus que l'année dernière, et l'année précédente, et encore celle d'avant... Une ouverture rafraîchissante à un autre type de cinéma, un autre regard, et que je suis aujourd'hui prête à apprécier dans son ensemble, ...

LOLA VERS LA MER (Laurent Micheli, BEL, 2019, 90 min) : Diffusé en avant-première au Festival du film francophone d'Albi Les Oeillades, Lola vers la mer de Laurent Micheli a mis donc la fièvre au sein du public albigeois et sort grand vainqueur à l’applaudimètre de ce festival ...

Il est bien dommage que ce film n'ait reçu aucune récompense au festival d’Angoulême, ne serait-ce que pour l'interprétation de Magimel et de ce.cette acteur.actrice bouleversant.e. de sincérité. La dernière accolade, brouillonne , instinctive, vous laisse désemparé. ...