LES MISÉRABLES

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En 2019 Ladj Ly, membre du collectif Kourtrajmé et très engagé socialement, réalise son premier long métrage de fiction : Les Misérables. Pas du tout une nouvelle adaptation de Victor Hugo, mais l’esprit rebelle de Montfermeil est toujours là.

On est donc aux Bosquets, en Seine-Saint-Denis, en patrouille avec la BAC. Il y a des tensions entre communautés et du côté des flics comme des civils, ça monte en pression. Jusqu’à la bavure. Une bavure filmée par un gamin et son drone.

Jamais partisan, mais regardant dans le blanc des yeux la cité et les rapports incestueux entre flics et voyous, Ladj Ly réalise un grand film sur la France, devenu 25 ans après La Haine de Kassovitz un puissant testament politique.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LA HAINE (LES MISERABLES et son portrait de la banlieue française représentent le même électrochoc que LA HAINE en son temps.) ou encore PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU (PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU et LES MISERABLES étaient tous les deux sélectionnés en compétition du festival de Cannes 2019.).

Les Misérables, le long, découle directement des Misérables, le court, nommé aux César en 2018. « Quand j’ai rencontré mes producteurs, ils m’ont demandé ce que je voulais faire, se souvient Ladj Ly. Je leur ai parlé de ce projet de long métrage mais qu’avant, j’aurais aimé en faire un court, pour bien montrer ce que j’étais capable de faire notamment aux financiers potentiels du long. On a lancé le court métrage et il a cartonné ; de là, on a lancé le long. » Mais trouver des financements n’a vraiment pas été chose facile, car le sujet dérange. « Ce genre de films, personne n’en veut, dit-il. Personne ne veut financer un film sur ‘des gamins qui veulent brûler des policiers’. On a tout entendu, notamment que ‘ce genre de films ne rentre pas dans les salles’. » Le film devait coûter 3 millions et finalement, c’est pour moitié moins qu’il a été produit.

Le sujet des Misérables, Ladj Ly le connaît bien : pendant plusieurs années, il faisait du cop-watching, c’est à dire qu’il surveillait, caméra à la main, les activités policières afin de traquer et dénoncer d’éventuelles violences. Ce qui lui a valu d’être la cible de plusieurs plaintes de la part de policiers : « À 19 ans, j’ai acheté ma première caméra, dit-il et depuis, j’ai toujours filmé. Avec le temps, ma caméra est devenue une arme, je me suis rendu compte de l’impact qu’elle avait, de l’impact des images à chaque fois que je les diffusais. Notamment quand il y avait des embrouilles avec les flics, si je sortais ma caméra, ça calmait tout le monde. Je me suis rendu compte de la puissance. La caméra me protège, quelque part. »

Projeté en avant-première au Festival de Cannes 2019, en compétition, Les Misérables est reparti avec le Prix du jury – jury présidé par Alejandro Gonzalez Iñarritu. Ensuite, il a été sélectionné dans bien des festivals étrangers, comme Toronto, où l’accueil a été dithyrambique – le réalisateur américain Michael Mann lui a apporté un soutien sans réserve. Puis le film a été nommé aux Golden Globes dans la catégorie Meilleur film étranger, et aux Oscars, où il représentait la France, parrainé par le cinéaste Spike Lee. Des mains du Syndicat français de la critique, il a reçu également le prix du Meilleur film français. Il a, par ailleurs, dépassé deux millions d’entrées sur le territoire.

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le spectaculaire "à l'américaine", franchement décalé par rapport au propos du film ...

Ce n’est que le deuxième jour du Festival de Cannes 2019. Cependant, un souffle de fraîcheur surgit précocement. Les Misérables de Ladj Ly fait l’effet d’un immense coup de boutoir aussi rare que déroutant. Dès lors, la compétition officielle, assez rapidement, commence ...

Les Misérables sera très probablement présenté comme une des sensations du dernier festival de Cannes, l’une des fameuses « claques » que la Sélection nous impose chaque année. Nouveau chapitre cinématographique sur les cités, qui reviennent à intervalles réguliers ...