LE PRINCE

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Ce qui nous arrive de pire peut-il se transformer en bénédiction, en révélation voire en résurrection ? Question posée par le film de Sebastian Munoz. Le réalisateur espagnol propose le portrait intense de Jaime, un jeune homme qui, un soir de beuverie en 1970, poignarde par passion son meilleur ami. Envoyé dans les geôles chiliennes il va lier d’amitié et plus si affinités avec un vieux détenu, El Potro, figure emblématique des lieux.

Cet amant-mentor fera de Jaime le Prince, El Principe, comme l’annonce le titre original… Liens intimes, amitiés, rapports de force, haines tenaces et espoir souvent ténu de rédemption : le film navigue sans fausse pudeur mais délicatement dans les méandres parfois bien sombres de cet univers carcéral que nous redoutons tous de connaître un jour.

Juan Carlo Maldonado et Alfredo Castro forment à l’écran un tandem attachant mais aussi sensuel, voire sexuel. Certaines scènes du film méritent d’ailleurs que le jeune public en soit éloigné sinon averti…

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LE BAISER DE LA FEMME ARAIGNEE (Jusqu'où seriez-vous prêt à aller pour vivre le moins rudement possible une détention ? Dans ces deux films, les liens amicaux voire sensuels aident à supporter l'indicible...) ou encore UN PROPHETE (Deux jeunes gens face à des mentors plus âgés... Quand la prison sert aussi de terrain d'apprentissage pour changer de vie...).

Quiconque a déjà mis en pied, même le temps d’une simple visite, dans une prison, peut témoigner de la sensation puissante qui se dégage de ces lieux. C’est affreux à dire mais la prison apparait d’emblée aussi comme un incroyable décor de cinéma et le 7e art ne s’en est d’ailleurs guère privé. Le Prince de Sebastian Munoz rappelle par sa trame l’époustouflant Un prophète de Jacques Audiard qui révéla le talent de Tahar Rahim en 2009. Jaime et Malik, les héros de ces deux histoires, se retrouvent derrière les barreaux, condamnés à de lourdes sentences. Il s’agit d’hommes jeunes, proies désignées et faciles pour les caïds de la place. Mais dans les deux cas, ils vont être protégés, éduqués par des détenus plus âgés et sortiront de là transformés à jamais, pour le meilleur ou le pire…

Le Prince ajoute un lien intime entre le novice et son mentor. Cette piste de la relation homosexuelle a également été abordée frontalement dans Midnight express d’Alan Parker en 1978. Brad Davis y incarnait un touriste américain arrêté pour trafic de drogue en Turquie et jeté dans les pires geôles du pays avec une double idée en tête : survivre et s’évader. La violence et la solitude le changeront à jamais et lui feront découvrir des "amitiés amoureuses" dont il se croyait incapable… Plus franchement gay, Le baiser de la femme araignée d’Hector Babenco en 1985, huis clos fascinant dans lequel un militant révolutionnaire macho ses retrouve incarcéré au Brésil avec un homosexuel extravagant. John Hurt  (récompensé aux Oscars et à Cannes) et Raul Julia y forment un formidable tandem…

Mais la prison, c’est aussi le film d’action comme dans L’évadé d’Alcatraz de Don Siegel en 1979 avec Clint Eastwood, Fortress thriller futuriste avec Christophe Lambert en 93 ou Evasion qui réunissait le duo-duel Stallone-Schwarzenegger en 2013. N’oublions pas Les évadés et La ligne verte, deux très jolis moments de cinéma signés Frank Darabont qui savent éclairer d’un peu de souffle et de lumière cet univers sombre…