LA FEMME DE TCHAÏKOVSKI

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A la suite de LA FIEVRE DE PETROV, Kirill Serebrennikov s’est attaqué à un projet ambitieux auquel il pensait depuis longtemps : une évocation du compositeur Tchaïkovski par le biais de son mariage avec une femme qui l’aimait passionnément, mais pour laquelle il n’éprouvait aucune attirance, étant homosexuel.  

Tournant dans l’ordre chronologique, le cinéaste s’attache à transcrire les épreuves successives traversées par cette femme au destin tragique, ainsi que ses efforts pour maintenir une relation vouée à l’échec. L’artiste y apparaît comme un être sombre et mélancolique, en rébellion contre les conventions d’une société normative et étouffante.  

A travers une mise en scène spectaculaire, Kirill Serebrennikov dépeint la société russe de la fin du XIXe siècle comme un cauchemar agité, empreint d’accents romanesques et intimistes. Les deux interprètes principaux, choisis pour leur jeunesse et pour leur expérience du métier, incarnent leurs personnages avec une puissance impressionnante.  

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LA SYMPHONIE PATHÉTIQUE (Même sujet traité sous l'angle baroque par Ken Russell) ou encore ANNA KARENINE (Adaptation du roman de Leon Tolstoi sur le mariage malheureux d'une aristocrate dans la Russie du XIXe siècle.).

Pour se documenter sur Tchaïkovski, dont on ne connaît pas grand-chose, Kirill Serebrennikov a consulté deux livres essentiels, dont l’un, écrit par Alexander Poznansky de l’université de Yale, retrace jour par jour la vie du compositeur, tandis que le second détaille la vie d’Antonina Milioukova. De là, le cinéaste a pu reconstituer les parcours de ses deux protagonistes. Celui d’Antonina l’intéressait particulièrement, parce qu’elle avait la réputation d’être une idiote qui ne comprenait pas le génie de Tchaïkovski, mais le cinéaste avait envie d’en savoir plus, sachant qu’ « il était inévitable, au contact d’un soleil aussi énorme, de s’y brûler ». 

Alors qu’au départ, il s’agit d’une histoire d’amour, le film prend des allures de thriller psychologique, au fil des phases traumatisantes par lesquelles passe Antonina et qui modifient profondément son rapport avec son mari. 

Pour trouver l’interprète d’Antonina, Serebrennikov a procédé à un casting extensif, faisant défiler toutes les jeunes actrices russes. Il voulait à la fois quelqu’un de très jeune, mais qui soit d’un niveau professionnel élevé. Une des difficultés que devrait affronter l’actrice était la méthode de tournage dans l’ordre chronologique, l’obligeant à accumuler les mêmes expériences que son personnage. Le choix s’est porté sur Aliona Mikhaïlova  dont l’interprétation a été saluée comme une révélation.  Face à elle, l’américain Odin Bifron interprète Tchaïkovski, auquel il ressemble physiquement. Le cinéaste l’avait déjà dirigé au théâtre à Moscou, où l’acteur était plus à l’aise qu’aux Etats-Unis. Comme il parle russe parfaitement, il n’a pas eu besoin d’être doublé.  

Au cœur du film se trouve le sujet de l’homosexualité : jamais évoqué explicitement, il est pourtant la raison principale de l’échec du mariage. Serebrennikov en profite pour pointer l’hypocrisie de la classe dirigeante à ce sujet, même si, en adoptant le point de vue de la femme, le film ne montre que ce qu’elle voit et que ce qu’elle sait.  

LA FEMME DE TCHAÏKOVSKI a été présenté en 2022 à Cannes, où Serebrennikov avait déjà précédemment montré LE DISCIPLE, LETO, et LA FIEVRE DE PETROV.  

La fièvre de Petrov perdait la conscience du spectateur en l’enfermant dans les délires d’un personnage sous l’emprise de la maladie : le nouveau film de Serebrennikov explore à nouveau le même dispositif, en l’enlisant cette fois dans la passion morbide d’une femme ...

Indéniablement, chez Kirill Serebrennikov, la forme est là pour servir le fond, pour nous dire quelque chose de ce réel piégeur et cafardeux que nous connaissons tant. Longtemps assigné à résidence par le pouvoir russe, notre homme est entré en résistance en adoptant un ...

Tchaïkovski... l'emploi du terme de "génie" est souvent galvaudé, mais pas dans le cas de ce compositeur absolument exceptionnel. Et encore, ces mots sont faibles. Mais on n'est pas ici pour parler de cette brillance, de cette carrière fabuleuse. Vous n'entendrez pas les notes ...